En mars dernier, nous avons lancé une série d’interview sur les femmes du digital. Cet article est le troisième volet.

Après nous être penché côté annonceur, puis côté influenceur et information, cette fois nous nous aventurons dans le monde des consultants.

Ainsi, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Fabienne Billat, conseil en communication et stratégie digitale et fondatrice de la délégation Femmes du Numérique Lyon Région au sein du Syntec Numérique.

 

Découvrez sans plus attendre nos échanges.

Bonjour Brandwatch, merci pour votre invitation !

Je fais du conseil en communication digitale et en intégration numérique pour les entreprises. Je réalise des interventions pour les grands groupes et je suis contributrice pour Les Echos et Forbes sur les sujets d’innovation.

En 2015, pour le Syntec Numérique, j’ai créé la délégation Femmes du Numérique Lyon Rhône-Alpes Auvergne, qui valorise les métiers de ce secteur auprès des étudiantes et des femmes.

Quel a été votre parcours professionnel ?

Ma passion pour la communication m’a amenée à travailler en agence pendant 10 ans. J’ai ensuite rejoint une start-up web en 2009 pour laquelle j’ai développé une technologie de sharing de liens pour la presse magazine.

Puis des entreprises m’ont sollicitées pour former leurs équipes sur les réseaux sociaux, ou établir leur communication digitale.

En 2014, toujours à l’affût des évolutions des usages, j’ai souhaité rétablir l’équilibre entre les injonctions tech de l’époque sur la transformation numérique vs la nécessaire implication des collaborateurs. Cette étude a été publiée dans Les Echos. Depuis, je réalise des interventions sur-mesure auprès des managers.

En tant que témoin privilégié de la digitalisation, quelles sont les opportunités que les médias sociaux et la social data ont apporté aux entreprises ?

Internet a totalement bouleversé la communication, les comportements, et par conséquent, le commerce. A tel point que cela nous oblige à réviser les organisations, les cadres législatifs, etc. Et cela se répand à tous les niveaux de la société et de l’entreprise.

Avec le web, les marques ont l’opportunité d’être en interaction directe avec leurs consommateurs.

Il y a quelques années, il suffisait d’être créatif, d’imposer ses accroches et ses punchline pour vendre. Maintenant, le consommateur connecté s’informe à 80 % en amont avant d’acheter. Il est en ubiquité entre les devices, les médias sociaux, il a la possibilité de réagir, voire d’influer sur la pertinence d’un service, instantanément.

La marque ne peut plus limiter ses actions de communication à l’aspect commercial, elles doivent être conversationnelles. Cela nécessite désormais de produire ses propres informations, des contenus personnalisés, devenir un média, une plateforme.

 

Le consommateur est réellement cross canal, et souhaite qu’on le reconnaisse, où qu’il soit (appli, site e-commerce, réseaux sociaux). Il attend qu’on lui réponde d’une seule voix. Cela représente un réel défi pour la marque, qui doit effectuer des sélections de canaux, tout en simplifiant et fluidifiant ce parcours. Il accomplit de nombreux aller-retour dans son parcours d’achat, essaimant au passage quantité de données.

Deux remarques :

  • L’essentiel du flux des données n’est ni traité, ni analysé par la majorité des entreprises. Là est pourtant toute la valeur de la connexion, et permet de créer de l’intelligence artificielle. C’est un outil extrêmement puissant en amont de l’acte d’achat, permettant l’utilisation de chatbot
  • Par la prolifération d’outils, de canaux de contacts, on sort de la vente simple d’un produit. Dès lors, il s’agit d’entraîner ses consommateurs par une image forte de l’entreprise, créer un environnement propice à l’utilisation d’un service, à la consommation d’un produit. Intégrer ses clients dans un univers emblématique, reconnu.

A votre avis, quelle est la prochaine tendance dans le domaine du digital ?

L’accélération des technologies propulse entre autres, l’intelligence artificielle, qui exige des compétences d’analyses. C’est un levier extrêmement fort comme je le disais plus haut, mais qui ne pourra s’absoudre d’une expertise avérée.

Les outils technologiques permettent la coordination des échanges, mais sont également des supports d’inventivité, de co-création. Pour concevoir des expériences client, il faut maîtriser ces deux aspects, en y associant le marketing, afin de travailler pour les objectifs commerciaux.

Les tendances, émergentes, sont la reconnaissance vocale, la reconnaissance faciale. Et toujours la messagerie instantanée et le contenu visuel sous toutes ses formes, dont la vidéo.

La distribution de masse de l’info est en passe de disparaître au profit d’informations attrayantes, à valeur ajoutée. On partage ce qui valorise.

Qu’est ce qui vous a motivé à évoluer dans le digital ?

La possibilité d’étendre les interactions et les rencontres, au-delà des distances, de l’espace temps, des cultures.

Le passage de la communication traditionnelle à la communication digitale n’a pas été un sujet, ni même une interrogation, mais une évidence.

Avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme ?

Si j’étais un homme, je pourrais mesurer le décalage ! Je constate seulement que le déploiement de mon activité nécessite beaucoup d’énergie.

Pensez-vous que le domaine du digital en France est paritaire ?

Là, il faut distinguer les secteurs :

  • L’ingénierie informatique déplore en France des chiffres très bas de présence féminine, dans les études, puis dans les parcours professionnels, pour les postes de gouvernance. C’est culturel, et remonte aux années 1970. On chiffre un taux de croissance de 66% pour des entreprises (tous secteurs confondus) dont le board est constitué d’autant d’hommes que de femmes, contre 6% pour les boards composés uniquement d’hommes.
  • Pour les métiers de services liés au numérique : communication, marketing, RH, les femmes y accèdent plus facilement.

Cet écart est propre à la France et l’Europe, mais ce n’est pas le cas en Asie par exemple. Ce n’est pas un fatalisme, et nous devons y travailler.

Du côté des entrepreneuses aussi, même si elles ne sont que 10 % en France il y a un potentiel fabuleux !

Comment pourrait-on aller encore plus loin ?

Ce sont toujours les mêmes leviers aux différentes étapes de l’apprentissage : éducation, information dans les collèges et les lycées, les études supérieures – témoignages de rôles modèles. A cet égard, les Femmes du Numérique du Syntec sont particulièrement actives à Paris et en région, à Lyon, pour faire valoir cette filière. Il s’agit d’instruire, d’acculturer professeurs, responsables des orientations professionnelles, dirigeants des écoles, des entreprises.

Nombreuses sont les associations qui œuvrent au quotidien pour accroître la présence des femmes dans le monde numérique.

Si vous aviez un conseil à donner aux femmes qui évoluent (ou qui souhaitent évoluer) dans le numérique ?

Avoir une solide formation, en y ajoutant des soft skills propres à la dynamique numérique : Être en éveil et présente, active sur le web, un réseau pro, et Twitter !

C’est là que se trouvent les énergies professionnelles, entrepreneuriales, les concepts d’innovation, marketing, tech etc.

Développer constamment ses connaissances, affiner qualitativement son réseau, faire des rencontres et partager lors d’événements, en retirer de l’intelligence productive.

Le web est une plateforme apprenante, remplie de richesses, il faut en user et en abuser !

Un grand merci à Fabienne de nous avoir accordé cette interview.