ÉTUDE
Fidélité et le consommateur engagé
Nous analysons l'impact du marketing engagé sur la fidélité client
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Près de deux tiers des consommateurs achètent, adoptent ou boycottent une marque en fonction de sa position sur des questions de société. A une époque où la fidélité client n’a jamais été aussi faible, pourquoi la plupart des responsables marketing hésitent-ils encore à prendre position ?
Dans ce rapport, nous explorons les problématiques contemporaines liées à la fidélité à la marque, ainsi que les risques et les avantages d’un marketing engagé dans le but d’attirer les clients.
Le décalage entre les marketeurs traditionnels et les consommateurs
Aujourd’hui, les marketeurs se divisent en deux camps, et le gouffre se creuse entre la philosophie traditionnelle du marketing qui cherche à « vendre à tout le monde » et la tendance émergente qui consiste à attirer délibérément un public plus restreint et à entrer en résonnance grâce à des émotions spécifiques significatives et, en général, axées sur des valeurs.
La première conception, toujours soutenue par la majorité des responsables marketing, encourage les entreprises à atténuer les risques en ne s’aliénant aucun client potentiel. Lorsque la fidélité à la marque était à son plus haut niveau, le fait de mettre en place un marketing « pour la moyenne » avait du sens. Désormais, les gens ne se soucient plus de savoir si les marques qu’ils utilisent disparaissent. La fidélité à la marque n’a jamais été aussi basse. Le nombre de produits et de types de produits se faisant concurrence pour obtenir une attention limitée est en croissance permanente, tout comme le sont les canaux de publicité et de recherche produits. Résultat, le pouvoir des consommateurs n’a jamais été aussi grand, et les marques et les agences ne peuvent plus se fier aux doctrines commerciales traditionnelles.
Certaines entreprises dominent encore avec succès les espaces de produits grâce à leur puissante notoriété (c’est le cas de Google et Amazon), mais sur les marchés actuels, presque tous les espaces de produits adoptent de nouvelles directions dictées par les besoins et souhaits émergents des clients. Cela signifie que les industries d’aujourd’hui peuvent être facilement mises en déroute par une marque qui répond mieux aux désirs et aux besoins des clients que d’autres marques existantes (encore une fois, voyez Google et Amazon).
« Les principes de base régissant la loyauté et l’engagement des clients ont été bouleversés. »
Alors, qu’est-ce qui pousse les clients à choisir une marque plutôt qu’une autre ?
Fidélité client vs fidélité traditionnelle à la marque
Bien qu’il soit facile d’utiliser de façon interchangeable « fidélité à la marque » et « fidélité client », les deux termes ont des connotations différentes.
La fidélité à la marque fait référence à la loyauté des clients envers les mêmes marques spécifiques. Cette conception provient d’un type de marketing courant au milieu du XXe siècle, lorsque les entreprises voyaient la concurrence augmenter et ne pouvaient pas compter sur le fait d’être la seule entreprise d’un secteur.
Les jingles, les publicités télévisées, les mascottes et parfois les médias sociaux étaient mis à profit pour promouvoir et distinguer les marques les unes des autres. Les entreprises se positionnaient comme des points d’ancrage permanents et distincts autour desquels elles attiraient le plus grand nombre possible de clients.
La « fidélité client », en revanche, place à juste titre les clients eux-mêmes au cœur de l’idée de loyauté.
En fin de compte, lorsque nous parlons de fidélité client, ce que nous essayons de faire, c’est d’expliquer où et comment les gens dépensent leur argent. Bien qu’un jingle ou un message amusant sur les médias sociaux puisse permettre à une marque de se différencier et de marquer les esprits, celle-ci aura du mal à conserver son audience lorsque vingt autres entreprises offriront les mêmes produits ou services de manière plus efficace ou à un coût inférieur.
De nos jours, qu’est-ce qui motive la fidélité des clients ? Nous constatons que les valeurs politiques et sociales influencent de plus en plus les comportements d’achat.
Une étude de YouGov suggère que les Millennials sont prêts à payer plus cher pour des produits durables ou de qualité supérieure. Et selon Edelman, les deux tiers des consommateurs de tous les groupes sont des « acheteurs engagés », ce qui signifie qu’ils choisiront, échangeront, éviteront ou boycotteront une marque en fonction de sa position sur des questions de société.
Dans ce contexte, comment les marques peuvent-elles se connecter avec les valeurs sociales et politiques de leurs clients, et quels sont les risques qui en découlent ?
« Nous voyons des entreprises comme Proctor & Gamble s’engager dans une forme de marketing moral. Or existe-t-il une organisation plus large et qui touche un public plus vaste que P&G ? J’aurais du mal à en trouver une. »
De l’intérêt de s’adresser au consommateur engagé
Comme l’affirmait notre directeur marketing dans un article : « Les marques les plus performantes et les plus rentables sont celles qui deviennent une extension de leurs clients – des marques possédant des logos ou des emblèmes si forts et indissociables de leurs valeurs que les clients s’identifient immédiatement à elles. »
Deux questions importantes se posent toujours lorsqu’une entreprise décide de mettre en place cette démarche : la position adoptée par l’organisation résonnera-t-elle auprès de son audience ? Et, tout aussi important, cette position représente-t-elle sincèrement les valeurs de l’entreprise ?
Il est extrêmement important d’étudier et d’identifier avec précision les problèmes et les causes qui préoccupent vos consommateurs. Par exemple, les marques peuvent utiliser des outils d’intelligence d’audience pour comprendre qui sont leurs followers, qui les influence, connaître les sites qu’ils partagent et leurs sujets de préoccupation.
Il est également essentiel de faire preuve de sincérité. Votre entreprise met-elle son argent là où elle le prétend ? Joignez-vous le geste à la parole ? Ces valeurs font-elles partie de l’ADN de votre organisation ?
« Les consommateurs respectueux de l’éthique ont un impact sur toutes les industries. Les meilleures entreprises définissent leurs valeurs et alignent tout leur travail sur ces dernières. Ces marques n’essaient pas d’être à la mode, et ne craignent pas d’être en désaccord avec certaines personnes. »
Selon une étude menée par Brand Keys, les consommateurs estiment que les marques ne sont pas égales face à la prise de position. Dans leur esprit, certains secteurs sont intrinsèquement plus associés à des valeurs politiques et sociales, de sorte que les marques qui ne font pas partie de ces industries pourraient ne pas sembler authentiques.
Les conséquences
Notre équipe Strategy and Insights s’est penchée sur les conséquences de la participation – intentionnelle ou non – de quatre marques à des conversations politiques.
La réception du public et du zeitgeist politique à chacune de ces prises de position était à chaque fois unique.
Le graphique suivant montre que la manière dont les marques participent aux conversations sociales et les raisons pour lesquelles elles le font peuvent conduire à des réactions très différentes de la part des consommateurs.
Patagonia, par exemple, est depuis longtemps une marque à fort contenu environnemental et politique. Ainsi, lorsque la marque a poursuivi le président Trump en 2017 après qu’il eut saisi un terrain classé monument national, plus de 70 % de toutes les réponses en ligne plaidaient en faveur de la marque.
Dick’s Sporting Goods a adopté une position résolument politique en arrêtant la vente de certains types de fusils au beau milieu du débat sur le contrôle des armes à feu, alors à son paroxysme suite à la fusillade de l’école Parkland.
Bien que les défenseurs de la marque l’emportaient toujours sur ses détracteurs, le fait que Dick’s était dépourvu de valeurs commerciales visibles avant la fusillade a rendu sa décision au mieux surprenante, au pire malhonnête.
En conclusion
Pour attirer des clients fidèles, les entreprises doivent se concentrer non plus sur « comment faire en sorte que les clients achètent notre marque », mais sur « comment concentrer nos efforts sur les clients alignés avec notre marque » ?
En fin de compte, lorsqu’il est mis en place pour de mauvaises raisons, le marketing engagé et fondé sur des valeurs n’est qu’une variante du branding. À une époque où la loyauté envers la marque ne cesse de chuter, une telle approche est vouée à l’échec.